Aux confins de Cassiopée, sur une toile bleue parsemée de points jaunes comme une symphonie de couleurs allant du bleu pastel à la profondeur d’une mer céleste. Pégase, cheval blanc ailé, galope.
Il vole, libre, heureux, avec la bénédiction du soleil, il a épousé sa belle étoile vagabonde qui a su accrocher son cœur vaillant. Il y a deux années déjà. Elle se nomme Electra. Elle est jaune, les pointes en angle si étroit que l’éclat de son rayonnement va au-delà de la galaxie. Elle ravit ses pensées chaque jour. C’est une merveilleuse compagne.
Pégase parcourt la galaxie, d’un coup de sabot du nord au sud, il déclenche des éclairs lorsque la planète bleue s’assèche. Il est très occupé, il a une amante secrète qui se nomme Astéria.
Elle est moins lumineuse, mais elle sait faire battre son cœur lorsqu’il la croise. Elle habite dans le creux de Titan. C’est une contrée rouge parsemée de stries noires. Les étoiles y sont moins nombreuses, mais l’ocre du tapis irradie d’une lumière si particulière que l’endroit est chaleureux.
Il aime les deux corps célestes. Il n’ignore pas la jalousie d’Electra alors c’est en toute discrétion qu’il rejoint Astéria. Astéria sait qu’il est marié. Elle aussi profite simplement du sentiment qui les réunit.
La lune effacée, le soleil de son rayon de lumière permet aux deux amants de se jouer d’Electra. La clarté de l’astre dissipe le moindre contour de ses quatre branches cardinales. Pégase grâce à son pelage blanc pur, devient lui aussi invisible. Astéria attire Pégase dès qu’il passe dans sa nébuleuse.
La lune a compris depuis longtemps le manège de Pégase. Ils leurs arrivent même de se cacher derrière sa face sombre pour en secret se retrouver. Un jour alors qu’Electra est au chevet de sa grand-étoile malade, Pégase retrouve Astéria. Il se cache dans la nuit étoilée derrière la face sombre de la lune.
– Pégase ! interpelle la lune
– Oui !
– Que fais-tu avec Astéria dans mon dos ?
– Rien !
– Tu me prends pour une bille? Tu crois que je ne vois pas votre petit manège. Je te rappelle que tu es marié !
– Lune, j’aime tout court! où est le mal ?
– La fidélité, la valeur de la fidélité! N’as-tu aucune conscience du mal que tu fais? Tu as beau être ailé, si Electra l’apprend, tu n’auras pas le temps de fuir !
– Mais tu ne diras rien, je le sais !
– Sors de là, retourne à Cassiopée et ne te sers plus de moi pour faire tes cachotteries. Compris !
Pégase bougonne dans son menton, il laisse Astéria attendre le jour pour rentrer chez elle, alors que lui retourne sagement dans sa galaxie maritale. Un peu vexé que la lune ne l’ait pas laissée profiter du moment avec sa maîtresse.
Après avoir sermonné Astéria, la Lune la laisse rentrer chez elle.
Mais la lune en a assez de servir de cachette. Elle qui ne peut bouger. Une idée lui vient. Elle attend le lever de l’astre solaire pour l’astre du jour:
– Soleil, j’aurai besoin de ton secours !
– De quel genre de secours as-tu besoin ?
– Une explosion solaire ainsi que d’une apparition improbable !
Tous deux discutent, ils mettent au point les derniers détails. Le jour suivant, elle sait que Pégase ne résistera pas à sa pulsion. Elle le voit arriver sur sa droite, contourner sa rondeur et disparaître. Astéria le rejoint.
– Pégase !
– Je suis occupé! Lune, pas maintenant !
– Vous pouvez sortir de votre cachette, le soleil est levé !
– Tous deux sortent de leur cachette, alors qu’Electra furibonde les attend également.
– Electra? Mais tu m’as dit que le soleil était levé, et…
– Eh oui, Pégase, la lune sait aussi mentir! j’ai demandé au soleil une explosion solaire, pour créer un rayon suffisamment important pour que tu croies que le jour était levé. Saches qu’ Electra, hier alors qu’elle rentrait de ses soins, est passée devant moi. Je lui ai simplement demandé de passer, car j’avais quelque chose d’important à lui montrer!
Electra bouillonne de l’intérieur, elle regarde tours à tours Pégase et Astéria:
– Je comprends maintenant toutes tes soi-disant obligations. Pégase, tu n’es qu’ un goujat, un menteur, et toi Astéria, une voleuse de mari !
Electra telle une comète fond sur Astéria. Un ballet d’énergie tournoie devant Pégase. De plus en plus vite, les deux étoiles se confondent en une masse irradiante. L’énergie générée crée un cône tourbillonnant qui aspire Pégase en son centre. Au travers du vent, il crie:
– Lune! pourquoi ?
– Je t’avais prévenu Pégase, il ne faut pas jouer avec les sentiments d’une étoile! Ni avec les miens. Tu n’as que ce que tu mérites !
Pendant que le vortex descendant expulse Pégase vers l’athmosphère, la lune satisfaite fait un clin d’œil au soleil qui maintenant se lève réellement.
Pégase chute lourdement. Il se retrouve au milieu d’une prairie. Il regarde autour de lui. Il est entouré de vaches noires et blanches qui ruminent tranquillement. Un regard vers le ciel. Il voit une distorsion céleste, effacer le cône. Il essaye de s’envoler, il ne peut pas. Il n’a plus d’ailes.Désormais, il n’est plus qu’un cheval. Vert!*
*vert: dépité